Qijun Zheng : « Making Maoshan Great Again: Religious Rhetoric and Popular Mobilisation from Late Qing to Republican China (1864–1937) »

Qijun Zheng a publié l'article “Making Maoshan Great Again: Religious Rhetoric and Popular Mobilisation from Late Qing to Republican China (1864–1937)”, dans la revue Religions (2025, 16(1), 97).
Cet article appartient au "Special Issue Transformations in Daoist Ritual Texts and Other Daoist Literature Since the Ming and Qing Dynasties" [numéro spécial « Transformations des textes rituels taoïstes et d'autres littératures taoïstes depuis les dynasties Ming et Qing »].
Qijun Zheng tient à exprimer sa profonde gratitude à son directeur de recherche, Monsieur le Professeur Vincent Goossaert, pour le soutien constant qu’il lui apporte dans ses recherches sur Maoshan depuis son mémoire de master, dont la publication du présent article constitue l’un des aboutissements.

Résumé

"Cette étude examine comment la rhétorique religieuse et la mobilisation populaire ont contribué à la préservation et à la diffusion des traditions taoïstes au Maoshan 茅山, de la fin de la dynastie Qing à la période républicaine (1864–1937). Elle s’intéresse particulièrement au corpus de textes religieux liés au Maoshan et à ses dieux tutélaires, les « Trois Seigneurs Mao » (三茅真君). À partir d’une analyse détaillée de sources primaires, notamment diverses éditions de la Monographie du Maoshan, de manuels liturgiques tels que l’Écriture (jing 經) et la litanie (chan 懺), ainsi que de textes performatifs comme le rouleau précieux (baojuan 寶卷) consacré aux Trois Seigneurs Mao, cette étude met en évidence six stratégies rhétoriques fondamentales employées par les taoïstes du Maoshan, regroupées dans l’acronyme IMPACT :
  1. Incorporation : intégrer des récits de miracles (lingyan ji 靈驗記) et des remèdes divins (xianfang 仙方) pour répondre aux besoins concrets et urgents de la société ;
  2. Mémoire : préserver la continuité doctrinale tout en évoquant la nostalgie culturelle, afin de renforcer l’attachement aux valeurs et au patrimoine traditionnels ;
  3. Performance : collaborer avec des conteurs professionnels pour diffuser des textes en langue vernaculaire par le biais de performances orales, atteignant ainsi un public élargi, y compris les non-lettrés ;
  4. Abréviation : condenser les textes longs en formats plus concis et accessibles ;
  5. Canonisation : élever le statut divin des déités via l’écriture inspirée (spirit-writing), renforçant ainsi leur autorité religieuse ;
  6. Traduction : adapter les textes classiques en langue vernaculaire pour en accroître l’accessibilité.
S’appuyant sur la théorie des “speech-act” de J.L. Austin, cette étude reconceptualise ces innovations scripturaires comme des « actes textuels » (“text-act”), soutenant que les textes du Maoshan ne se contentent pas de transmettre la doctrine religieuse, mais influencent activement les pèlerinages et les pratiques dévotionnelles par leur force illocutoire et perlocutoire. En outre, elle met en lumière le rôle essentiel des réseaux sociaux, et notamment l’action de personnalités clés telles que Zhang Hefeng 張鶴峰 (fl. 1860–1864), Long Zehou 龍澤厚 (1860–1945), Jiang Daomin 江導岷 (1867–1939), Wang Yiting 王一亭 (1867–1938) et Teng Ruizhi 滕瑞芝 (fl. 1920–1947), qui ont soutenu la reconstruction, la réimpression et la diffusion de ces textes. Enfin, l’étude interprète les pèlerinages au Maoshan comme une forme de mobilisation populaire et de résistance face aux campagnes anticléricales et anti-superstition, montrant comment, envers et contre tout, Maoshan a émergé en tant que lieu de convergence entre dévotion religieuse et activité économique au profit des communautés locales. En conclusion, malgré les défis rencontrés dans l’application de la théorie des “speech-act” à l’analyse des “text-act”, les résultats indiquent que la survie et la renaissance des traditions taoïstes au Maoshan découlent non seulement de la préservation et de l’innovation textuelles, mais témoignent aussi de la façon dont la rhétorique religieuse, conjuguée à un engagement social stratégique, peut stimuler la mobilisation populaire, raviver la dévotion collective et transformer en profondeur les paysages culturels."
Page de l'article : https://www.mdpi.com/3142096