Programme RELIF – compte rendu de la séance du 22 novembre 2023

La troisième séance du programme Religion et Francophonie (RELIF) a commencé, comme à l’habitude, par un tour de table, qui a notamment permis d’échanger sur travaux en cours (thèse de doctorat de Constance Varoquier) et publications en perspective (manuscrit de Richard Lengo). Puis les organisateurs remercient vivement le docteur en sociologie Richard Lengo (maître assistant CAMES, docteur de l’Université Maren Ngouabi de Brazzaville) d’avoir accepté de nous partager ses travaux sur “Les mutations de l’éthos protestant au sein de l’Eglise Evangélique du Congo”. L’orateur s’est appuyé sur une projection Powerpoint qui détaille son plan, sa méthodologie (recours aux travaux de Roger Bastide, George Balandier, l’école interactionniste de Chicago…) et ses principaux résultats. Richard Lengo a commencé son analyse en rappelant cette exclamation : “même les protestants !” Tenue dans les années 1990 à Brazzaville, la formule exprime une déception par rapport au comportement public d’acteurs protestants réputés jadis comme intègres. Et dont les pratiques de corruptions rejoignent désormais celles du reste de la population. Eclairé par 261 entretiens, dont 215 par questionnaire, Richard Lengo explique que jusqu’au début des années 1990, les protestants de l’EEC (principale Eglise protestante de la République du Congo) étaient socialement reconnus pour leur intégrité en matière de gestion financière. Mais les transformations socio-économiques (effets du Programme d’Ajustement Structurel du FMI, etc.), accroissant la précarité et la recherche de positions stables, ont eu raison de ce modèle. L’ethos protestant de jadis s’est altéré. C’est la fin d’un certain « exceptionnalisme protestant ». Ces mutations ont par ailleurs induit le passage d’un ethos de vocation, jadis dominant, à un ethos de professionnalisation où la fonction pastorale devient davantage convoitée pour des raisons économiques que pour des raisons vocationnelles. L’occasion de souligner qu’au travers de l’étude des mutations de l’ethos protestant, cette thèse constitue aussi une contribution à l’histoire socio-économique, politique et culturelle du Congo. Richard Lengo a achevé son exposé par une analyse du rapport à la langue française au sein de l’Eglise Evangélique du Congo. Outre le Kikongo et le Lingala (deux langues nationales), le Français est langue officielle, et est utilisé au sein de l’Eglise evangélique du Congo suivant diverses modalités. De rares paroisses (d’intellectuelles) organisent tous les cultes en français, beaucoup d’autres traduisent, ou se focalisent sur la langue vernaculaire dominante. La présentation s’est poursuivie par un débat nourri, alimenté notamment par le sociologue Jean-Paul Willaime, par les historiens Sébastien Fath et Pascal Bourdeaux (cf. photo ci-dessus). Plusieurs questions ont été poursuivies, comme l’enjeu de la différence axiologique des Eglises dans un contexte de sécularité environnante, celui de la métaethnicité, de la diaspora de l’Eglise Evangélique du Congo, de la course aux diplômes chez les pasteurs, et la tension entre encastrement Eglise-institutions économiques et sociales, et dérive mafieuse. Des fils de discussions (liste non exhaustive) qui témoignent de la richesse des travaux présentés par Richard Lengo.
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